Anne Osmont, grande dame de l'occulte.




Anne Osmont



Anne Françoise Eugénie Osmont est née le 2 août 1872 à Toulouse d’Athanase Eugène Osmont, un négociant et d’Antoinette Espérou, sans profession. Celle qui fut une des plus grandes occultistes du début du vingtième siècle n’est malheureusement pas honorée comme il se devrait dans la ville rose de son enfance, tant son domaine d’activité reste chez les bien-pensants une dérisoire lubie de désœuvrée.

Son chemin croisa par deux fois au moins les seuils de l’énigme de Rennes-le-Château car elle connut fort bien Prosper Estieu qui fut l’instituteur poète du petit village et aussi le sulfureux Georges Monti, âme damnée dit-on de Pierre Plantard.




Laurent Taillade

Laurent Taillade (1854-1919)
Anne fit des études classiques dans une pension toulousaine catholique de la rue des 36 ponts, la pension Lafont qui existe toujours  mais reprise par d’autres religieuses sous le nom d’école Montalembert-Notre Dame. Son intelligence vivace et ses talents d’écriture lui  permirent à la fin de sa scolarité de trouver du travail dans le domaine du journalisme. Elle assura des chroniques judiciaires pour les journaux « La Fronde » ou le « Matin » de Bruxelles.
A Paris, son intérêt pour le mouvement symboliste et son amitié pour Ernest Raynaud, lui permettent de rencontrer Verlaine. Elle publie un recueil de poèmes « Nocturnes », un roman « Le sequin d’or » où il semblerait qu’elle projette une part de sa propre existence. Elle figure aussi parmi les rares poétesses de son temps qui sont régulièrement publiées. Au « Mercure de France » son nom voisine avec celui d’un autre poète, écrivain et occultiste toulousain Maurice Magre.



En 1897, on lui connaît une liaison avec l’écrivain Laurent Taillade, originaire de Tarbes et connu pour ses provocations et ses duels à répétition. Etrange liaison s’il en est de l’ésotériste et du polémiste. Mais ce serait oublier le caractère bien trempée de la toulousaine.
En 1902, elle est critique théâtrale auprès de « La revue d’art dramatique », assure la critique musicale de la revue « L’essai », donne des essais sur la poésie dans la revue « La pensée ».
Dans les années vingt, elle publie des nouvelles comme « L’enchanteur » dans « Le journal des débats politiques et littéraires », est plusieurs fois primée par diverses sociétés de gens de lettres et donne des conférences sur des sujets historiques ou ésotériques les plus variés (Le duc de Guise, Les Celtes en Asie, Chopin, les pyramides…).
La décade qui suit la voit adapter des scénarios de cinéma sous forme de roman pour des revues grand public.









Mais à côté de cette vie publique aussi active qu’éclectique, Anne Osmont se livre toute entière à sa seule passion dévorante qui est celle de comprendre le monde dans lequel elle vit. Dès l’âge de quinze ans, sa chère grand-mère, proche d’une tribu de gitans espagnols, lui enseigne les vertus médicinales des plantes et l’influence des astres. Elle-même, férue d’études philosophiques et religieuses, apprend très tôt l’hébreu et s’ouvre ainsi à l’étude de la kabbale. 





Envoutements


Un des grands succès de librairie d'Anne Osmont.




Vers ses vingt cinq ans, elle commence à pratiquer régulièrement la projection de son double astral. A ce propos, elle donnait aux journalistes qui venaient l’interroger l’anecdote suivante : Appelée par une amie séjournant à Istanbul pour venir en aide à son mari malade, elle se dédouble mais est arrêtée un instant par une immense statue. Sachant que l’Islam interdit toute effigie de Mahomet ou de ses grands saints, elle hésite, puis poursuit sa mission avec succès. Les jours suivants, elle reçoit une lettre l’informant de la guérison inexpliquée du malade. La statue qui l’avait tant intriguée était celle de Mustapha Kemal, mais elle l’ignorait !
Plus tard, elle prouva ses capacités en disposant sur une table des feuilles de cigarettes selon une géométrie convenue par avance et alors qu’elle était endormie loin de toute atteinte physique de ces objets. Et pourtant, les incrédules cherchent encore aujourd’hui des preuves au dédoublement astral.



Revue Initiation et Science
Elle côtoie déjà à Paris tout le beau monde de l’occultisme de ce début de XXème siècle et écoute Emma Calvé chanter dans les meilleurs salons.
Elle travaille avec le maître des hypnotiseurs Hector Durville, écrit des articles pour la revue "Initiation et Science".

Mais ce sont deux hommes qui l'influenceront profondemment.

Le premier est Charles Henry, le savant directeur du laboratoire de physiologie des sensations à l'École pratique des hautes études. Ce grand spécialiste de la lumière et des couleurs appréciera la collaboration de la jeune femme qui le suivra dans les cénacles scientifiques parisiens.

Le second fut l'occultiste François Charles Barlet qui cache sous ce pseudonyme Albert Faucheux (1838-1921). Faucheux, qu'Anne Osmont rencontre chez
Stanislas de Guaita a cotoyé Papus au sein de la Société Théosophique, puis de la Faculté des sciences hermétiques. En 1890, il est évêque de l'église gnostique de Doinel, en  1891, il est membre du Premier Suprême Conseil de l’Ordre Martiniste. En 1897, il est grand maître de l’Ordre kabbalistique de la Rose-Croix. De 1901 à 1903, Il est directeur de La Revue Cosmique. F.-C. Barlet cotoie et connait tous les grands noms de l'occultisme : Papus, Joséphin Péladan, Paul Sédir (Yvon Le Loup), Lucien Chamuel, Stanislas de Guaita, Augustin Chaboseau. Autant dire qu' Anne est à très bonne école. Aux cotés de Barlet, elle suit également l'enseignement d'un autre occultiste Max Théon (1848–1927), le fondateur de "The Hermetic Brotherhood of Luxor", une autre organisation occulte, versée dans la Kabbale.

Souvent approchée par la franc-maçonnerie, Anne Osmont refusa toujours toute allégeance à un
quelconque mouvement ésotérique.
Elle reçut un jour une lettre sur papier jaune (c'était l'usage de Paladan). Elle commençait par "Ma chère soeur en Jésus-Christ" et était signée Vella Marcus. Elle y apprend que ce Monsieur n'est autre que Georges Monti, l'ancien secrétaire de Peladan qui demande à la rencontrer dans le but de "renouveler l'ordre des Templiers".




Monti se dit appuyé par de très hautes loges allemandes et anglaises. Le but de ce mouvement n'est autre que la destruction des valeurs du monde actuel après une "Apocalypse de catastrophes" ! (l'entrevue se déroule en 1922 et dure quelques trois heures). 
Le nom de cet ordre ?  L'O.T.O.  (Ordo Templi Orientis) dont le grand maître était le très sombre Aleister Crowley (1875-1947).
Mais Anne est profondément catholique et tertiare de Saint François d'Assise, à ce titre, elle est le plus souvent vétue d'habits marrons et porte une grande croix. C'est ainsi que Monti l'a croise dans une bibliothèque et comprend qu'elle ne rejoindra jamais l'O.T.O.


Anne Osmont vécut longtemps dans un appartement parisien fort modeste, garni de livres. Les plus précieux d'entre eux, ceux qui nécéssitaient l'attention d'esprits plus avertis étaient soigneusement gardés sous clef. C'est là qu'elle décéda le 13 mai 1953 des suites d'une intoxication due à une fuite de gaz.
Nombreux furent les amis de cette grande dame de l'occultisme a déclaré avoir reçu d'elle des manifestations de son affection post-mortem.

Christian Attard





Bibliographie non exhaustive d'Anne Osmont :


Petite histoire d'Angleterre / G.K. Chesterton ; trad. d'Anne Osmont.
Nocturnes, poèmes, Prix des Manuscrits de la Vie Heureuse.
Le sequin d'or, roman.
1917 - Le mouvement symboliste : Mallarmé, Villiers de l'Isle-Adam, Verlaine, Arthur Rimbaud, Jules Laforgue, René Ghil, Moréas et l'école romane ; préface de M. Ernest Raynaud. Paris : Maison du livre
1922 - Petite histoire d'Angleterre / Gilbert Keith Chesterton ; traduction d'Anne Osmont / 3e édition / Paris : G. Crès
1924 - "Entretien" composé par Mme Anne Osmont, et dit par elle, à l'occasion du cinquième anniversaire de la mort de Frédéric Forthuny, le 25 juin 1924 Nogent-le-Rotrou : impr. de Daupeley-Gouverneur
1930 - Le Symbolisme de la coupe, le langage des formes. Paris : H. Durville
1930 - Le Symbolisme de la croix, le langage des formes. Paris : H. Durville
1930 - Le Symbolisme du disque, le langage des formes. Paris : H. Durville
1930 - Le Symbolisme du glaive, le langage des formes. Paris : H. Durville
1930 - Le Symbolisme du sceptre, le langage des formes. Paris : H. Durville
1930 - Le Symbolisme du serpent, le langage des formes. Paris : H. Durville
L'art d'être heureuse.
Mes souvenirs.
1942 - Le Rythme, créateur de forces et de formes. Paris, Les Éditions des Champs-Élysées
1944 - Plantes médicinales et magiques, Les Éditions des Champs-Élysées. Préface du Dr J.-E. Emerit
1946 - Traité de physiognomonie. Paris : Ariane (impr. de Chaix)
1947 - Clartés sur l'occultisme. Paris, Dervy
1949 - Le Pater : commentaires ésotériques / Anne Osmont / Paris, les Éditions des Champs-Élysées (Impr. de l'Omnium littéraire)
1954 - Envoûtements et exorcismes à travers les âges : rituel de défense. Précédé de Souvenirs personnels sur l'auteur par Sonia Bentkowski-Levritch / Paris, Omnium littéraire
1955 - Soixante année d'occultisme vécu, mes voyages en astral. Les éditions des Champs-Elysées.





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