La croix de la Victoire




Pilier de soutien de l'ancien maître-autel de Rennes-le Château, 
aujourd'hui placé au musée de Rennes-le-Château dans sa position initiale.

(Photo ch. Attard)







Les chercheurs de l'énigme de Rennes-le-Château sont arrivés aujourd'hui à bien reconstituer l'intérieur de l'église où officia l'abbé Saunière à son arrivée. Il est inutile de revenir sur l'apparence de l'autel primitif que le prêtre remplaça au tout début de ses travaux. Ses deux piliers de soutien ont été retrouvés et le plus connu trône désormais dans le musée du site après avoir servi de support à une statue de la Vierge Marie dans le petit jardin à l'entrée de l'église. (1)
 
Ce que l'on a peut-être un peu moins étudié est son décor et sa possible datation. Il est en tout cas traditionnellement appelé, "le pilier mérovingien ou le pilier wisigothique". Qualificatif qui a bien servi à la "belle histoire" concoctée par Pierre Plantard et ses sbires.

L'entrée "Mérovingiens" de l'encyclopédie en ligne Wikipédia est claire : "Les Mérovingiens sont la dynastie qui régna sur une très grande partie de la France et de la Belgique actuelles, ainsi que sur une partie de l'Allemagne, de la Suisse et des Pays-Bas, du ve siècle jusqu'au milieu du VIIIe siècle."
Et, l'on se doit d'évoquer plutôt les wisigoths qui, de toutes manières, s'éteignirent dans le sud de notre pays au tout début du VIIIe siècle aussi.
 
Nous allons voir qu'il faut, très probablement, ajouter quelques deux siècles de plus à cette hypothétique première datation de notre pilier et que son étude plus précise va nous ramener à quelques pistes connues.



Croix de la Victoire



Face antérieure de la Croix de la Victoire d'Oviédo
(Source Wikipédia)



La Croix de la Victoire que l'on peut admirer ci-dessus est un joyau de l'art préroman. Elle se trouve aujourd'hui conservée dans la Cámara Santa de la cathédrale Saint-Sauveur d'Oviedo. Elle est devenue l'emblème des Asturies.

Croix des Asturies



Blason de la principauté des Asturies

Cette croix fut exécutée pour le roi Alphonse III au début du Xe siècle. Le souverain en fit don à la cathédrale Saint-Sauveur d'Oviedo en 908 comme le précise une inscription sur la croix.
Selon la tradition (mais elle a été démentie par les chercheurs contemporains), la croix en bois qui se trouve à l'intérieur de la Croix de Victoire aurait été celle que le roi Don Pelayo (Pélage) a soulevée lors de la bataille de Covadonga , en 722, au cours de laquelle les troupes asturiennes ont vaincu les musulmans.



Le roi Pelages



Le roi Don Pelayo à Covadonga , par Luis de Madrazo . 1855. ( Musée du Prado , Madrid )
(Source Wikipédia)



A l'évidence, la source d'inspiration du graveur du pilier de l'autel de Rennes-le-Château est bien cette croix d'Oviedo.
L'ornementation de ses bras est la même, son centre portant un reliquaire est le même, l'alpha et l'oméga y sont aussi présents et plus que tout le support permettant le port de l'emblème, sa hampe est visible sur l'original comme sur la copie du pilier, marquant ainsi son rattachement à l'épisode de la victoire du roi Pélage et non à une quelconque tradition wisigothique antérieure.

On comprend aussi que la dalle du musée de Narbonne que Gérard de Sède présente dans son ouvrage "Le secret des Cathares" comme datant du VIIe siècle et étant manichéenne est aussi une déclinaison de l'épisode de la victoire du roi Pélage qui se déroula en 722. Dans tous les cas, notre pilier date du VIIIe siècle au plus tôt. Le personnage que l'écrivain n'identifie pas et qu'il présente sur un bâteau !! est en réalité,assis sur son trône et il n'est autre que notre Pélage brandissant sa croix de Victoire. Le pilier de Rennes-le-Château ré-affirme donc la reconquête de l'Espagne sur les musulmans en rappelant aux chrétiens cette croix de la Victoire du Roi Pélage.

C'est un symbole fort que développa en Espagne le roi Alphonse II le Grand ou le Chaste (791-842). On peut dès lors dater notre pilier de Rennes-le-Château du IXe siècle au plus tôt et plus probablement du Xe siècle, époque où régnaient sur le Razès les descendants du Guillaume de Gellone, premiers comtes des lieux.

Christian Attard - 28 décembre 2020




Croix Narbonne



Croix manuelle à branches divergentes, gemmée et recercelée.
(pilier wisigothique, Musée de Narbonne)







Notes et sources :

(1) Une copie est donc visible à sa place dans le jardin.





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